4-19 - Conséquences du changement climatique sur la conception des maisons passives
13/06/2023 -
Evolution climatique
Il n'aura échappé a personne que l'année 2022 n'a pas été une année normale sur le plan du climat et de ses importantes répercussions sur nos lieux de vie, habitat, bureaux, commerces, écoles… qui ont eu une forte tendance à surchauffer même en dehors de la période estivale, notamment pendant les multiples périodes de canicule qui se sont suivies et échelonnées sur plusieurs mois.
Le climat évolue. Il suit les prévisions du rapport Meadows de 1972 et de ceux du GIEC, le Groupement International d’Etude du Climat. Comme il est prouvé que de telles situations vont se reproduire et même s'amplifier, nous en faisons malheureusement de plus en plus souvent le constat, il parait indispensable de se préoccuper de l'adaptation éventuelle des concepts des maisons passives mais aussi et surtout de l'évolution de leur conception afin de continuer à assurer les performances thermiques et les économies d'énergie mais aussi et surtout le confort sans système de chauffage traditionnel et, si possible, sans système de climatisation.
Evolution en période hivernale
La période froide, celle qui impose théoriquement le recours au chauffage, a tendance à être plus courte que par le passé avec des variations de température plus importantes, souvent bien plus chaudes qu’à la normale mais parfois aussi bien plus froides. Les retours d’expérience montrent que les maisons passives, essentiellement conçues pour réduire l’énergie de chauffage, ne présentent pas de problème particulier en cette saison. L’évolution climatique limite en effet le besoin de chauffage mais peut par contre imposer des puissances plus élevées qu’à la normale pendant les courtes périodes les plus froides sans soleil.
Pendant les séquences de temps avec très peu d'apports solaires, la mise en service des sèche-serviette peut largement compenser la puissance manquante. L’effet joules des systèmes d’appoint doit toutefois pouvoir être remplacé par la chaleur de systèmes thermodynamiques pour limiter la consommation et les frais résultant de l’usage de l’énergie payante de plus en plus chère. Le remplacement de l’effet joules par des poêles toujours trop puissants est à éviter parce qu’ils provoquent des fuites qui ne permettent pas toujours d’obtenir l’étanchéité à l'air nécessaire au label passif. C'est aussi parce que les retours d’expérience montrent que la chaleur n’est pas correctement répartie dans toutes les pièces, notamment celles en second rang.
Evolution en période estivale
Les périodes chaudes ont par contre tendance à être plus longues que par le passé avec des températures en moyenne bien plus élevées qu’à la normale. Les records se suivent au fil des ans. Les périodes de canicules se multiplient dans le courant de la même année. Pendant ses séquences, la température nocturne ne baisse pas toujours suffisamment pour qu’il soit possible d’évacuer pendant la nuit toute la chaleur qui a été stockée dans les parois massives de la construction pendant la journée précédente. Pire, il a été constaté, notamment dans les grandes villes, des températures extérieures supérieures aux températures intérieures jusqu’en milieu de nuit!
Pendant les périodes de grande chaleur :
- L’inertie thermique par absorption, l’effusivité des matériaux intérieurs peut devenir contreproductive. La ventilation ne permet pas toujours de rafraîchir suffisamment pendant la nuit. Encore chaudes le lendemain matin, les parois massives ne pourront pas stocker l’énergie de la chaleur diurne suivante.
- L’inertie thermique par transmission permettant la diffusion de chaleur dans les murs extérieurs devient par contre de plus en plus indispensable. Les matériaux qui bénéficient des meilleures performances sur ce point sont les isolants biosourcés qui nécessitent peu d’énergie lors de leur fabrication et qui sont les seuls capables d’isoler et de réduire simultanément la vitesse de transmission du flux de chaleur vers l’intérieur.
- Les puits provençaux montrent leurs limites, car leur puissance dépend du débit de la VMC double flux de chaque bâtiment mais aussi de la température de l’air neuf qu’ils peuvent procurer. Celle-ci a malheureusement plutôt tendance à augmenter d'autant plus que la fréquence annuelle des canicules est élevée et que leurs durées sont importantes.
- Les calculs thermiques indiquent que même en supprimant toute transmission directe de chaleur au travers des vitrages, en fermant entièrement toutes leurs protections solaires, voire même en simulant la suppression de toutes les menuiseries, les risques de surchauffes persistent dans les régions françaises les plus chaudes.
Evolution de la conception
Les performances thermiques d’une maison passive qui sont excellentes en hiver le sont également en été. Les isolants, les fenêtres triple vitrage, la suppression des ponts thermiques ou encore l’étanchéité à l’air qui réduisent fortement la sortie de la chaleur par temps froid limite évidemment tout autant sa pénétration en été. Ces performances sont suffisantes pour que la climatisation ne soit pas utile la plupart du temps. En période de canicule, elle peut toutefois devenir indispensable. Concrètement ce n’est pas un réel problème puisqu’une maison passive n’est pas une construction sans chauffage mais seulement un bâtiment dans lequel un système de chauffage traditionnel n’est pas nécessaire. Le chauffage peut donc être assuré par un système thermodynamique réversible simple, un monosplit de puissance adaptée qui peut également rafraîchir en période de canicule s’il est réversible.
Les besoins de climatisation d’une maison passive sont inférieurs aux besoins de chauffage, car les périodes de canicule sont, pour l’instant, bien plus courtes que les périodes de chauffage et que les écarts de températures entre l'intérieur conditionné et l'extérieur sont généralement plus importants en hiver. Les puissances de climatisation sont également plus faibles. La puissance utile pour le chauffage sera donc suffisante pour la climatisation. Un appareil de 10 à 15W/m2Shab de puissance spécifique de chauffage et de climatisation suffit dont à toute maison passive. Dans une construction de 100m2, une puissance de 1,5kW est suffisante. Une puissance de 2kW permettra de pallier aux aléas de la météo et au fait qu’un appareil de puissance plus faible est introuvable. Avec un coefficient de performance minimum de trois, le besoin d’énergie finale électrique sera d’un maximum de 5kWh/an et la puissance sera réduite à un maximum de 500W qui peut être couvert par quelques panneaux photovoltaïques et éventuellement un peu de stockage.
En résumé :
Malgré les évolutions climatiques, les concepts des maisons passives sont tout aussi valables aujourd’hui que lors de leur définition à partir des années 1980 parce qu’ils sont optimisés et basés sur le principe de compensation. La conception de bâtiments passifs doit par contre évoluer parce qu’il est de plus en plus nécessaire de prévoir l’installation d’une climatisation succincte et de faible puissance pour assurer le confort pendant les périodes de canicule. Les conséquences énergétiques qu’un tel équipement implique sont toutefois négligeables, voire même bénéfiques, car un appareil réversible de ce type permet la réalisation d’économies de chauffage hivernal supérieures aux dépenses nécessaires à la climatisation estivale. Les retours d'expérience montrent que l'installation d'un seul appareil de ce type au rez-de-chaussée d'une maison de 150m2 permet d'assurer le confort au plus froid de l'hiver comme au plus chaud des périodes de canicule.
Thème 4 - Les maisons passives