4-10 - Optimisation économique des maisons passives
Les bases du concept passif
Le concept de « Maison passive » est basé sur une amélioration de tous les composants de la construction ayant une incidence sur le bilan énergétique en limitant les actions au meilleur rapport qualité/prix qui est atteint lorsqu’il devient possible de remplacer le réseau de chauffage classique par celui de la VMC auquel est attribué, à peu de frais, une double fonction de ventilation et de chauffage. Les actions doivent simultanément porter sur les parois de l’enveloppe et leurs jonctions sans pont thermique, les portes et fenêtres ainsi que sur la qualité de la ventilation.
Atteindre cet optimum, c’est avant tout, chercher à respecter un des deux critères du chauffage défini par le concept Passivhaus pour un prix minimum. La totalité des critères, définis dans l’article « Les critères du concept Maison passive » et rappelés ci-après, doivent bien sûr être entièrement respectée.
Le principe est simple. Sa mise en œuvre qui n’impose aucune obligation de moyen est autrement plus complexe. Atteindre le meilleur rapport qualité/prix en améliorant les prestations thermiques de manière à pouvoir chauffer par le réseau aéraulique de la VMC ne signifie pas que toutes les combinaisons possibles de matériaux et matériels ont été recherchées, mais uniquement que le résultat est atteint avec, par exemple, les choix spécifiques du type de matériau constituant les façades, le sol ou le plafond du dernier niveau. La construction n’est alors pas passive au moindre coût possible, mais simplement optimisée avec les options arbitraires choisies qui, elles, ne sont pratiquement jamais préalablement optimisées sur le plan économique.
Construire passif pour le moindre prix consiste à optimiser chacun des composants thermiques du projet et pas seulement sa globalité contrôlée par la mise en œuvre des calculs thermiques PHPP de toute façon indispensables.
Développer les constructions passives implique de trouver les meilleures solutions combinées de la totalité des variables qui interviennent dans le prix de construction, car contrairement à l’optimisation thermique globale qui ne résulte pas de la compilation des meilleures performances thermiques de chaque composant, en matière de prix, c’est bien de la somme des économies provoquées par chacune qui réduira globalement les coûts et permettra le développement et la reproductibilité du concept à un prix global acceptable.
Les variables du prix de construction
Le prix de construction dépend entre autres et probablement de manière non exhaustive :
- De la zone climatique d’implantation du projet
- Du choix du critère de chauffage
- De la compacité du projet
- Des protections solaires
- Des matériaux de structure et d’isolation
- Des performances des matériaux et des matériels disponibles
- Des choix et détails techniques de conception
- Des répercussions de l’obligation de fait de compensation entre prestations thermiques
Les limites des calculs thermiques
Les calculs thermiques permettent seulement d’optimiser les caractéristiques thermiques des matériaux et matériels choisis ou imposés par avance comme par exemple l’épaisseur de l’isolant et les caractéristiques des menuiseries. Les résultats des calculs dépendent, par exemple, du climat sans qu’il soit possible pour autant d’agir sur lui. Ils dépendent tout autant de la compacité du projet que les calculs ne peuvent pas améliorer.
La zone climatique d’implantation du projet
Concevoir un projet passif à Paris ou à Toulouse, en plaine ou en montagne, ne doit pas uniquement conduire à déterminer les épaisseurs des isolants en fonction des climats, mais à déterminer les meilleurs choix conceptuels en fonction de leur rapport qualité/prix et des possibilités locales. À choix identiques, le prix d’un projet dépendra toujours du climat parce les prestations thermiques devront être d’autant plus performantes que le climat sera froid en hiver ou chaud en été en cas de besoin de climatisation. Toutes choses étant équivalentes par ailleurs, une construction passive coûtera plus cher à Paris qu’à Toulouse parce que le climat y est plus froid en hiver alors qu’il n’est pas nécessaire de climatiser dans les deux cas. Le résultat pourrait être équivalent en cas de besoin de climatisation en région plus chaude.
Les constructions passives sont moins chères dans les climats les moins froids en hiver
Le choix du critère du chauffage
La puissance maximale nécessaire au chauffage d’un projet passif par la VMC doit être de 10Wu/m2Shab tel qu’expliqué dans l’article « Les limites du chauffage par l’air ». Il est toutefois admis, tel que précisé dans l’article « Les critères du concept Maison passive », que le besoin maximum soit limité à 15kWhu/m2Shab/an, s’il est chauffé par un autre moyen. Le prix du projet dépend donc du choix du critère de chauffage retenu.
Le besoin correspond au produit de la puissance par la durée de chauffage
Besoin = Energie calculée = Puissance * Durée de chauffage
Si on décide de respecter le critère de puissance à 10Wu/m2Shab pour chauffer par l’air, la seule variante possible, dans la formule ci-dessus, sera le besoin puisque la durée de chauffage est toujours fixée par avance par le climat. Plus la durée de chauffage sera faible et plus le besoin le sera. En zone chaude le besoin est souvent inférieur à 10kWhu/m2Shab/an, il est de 15kWhu/m2Shab/an en Allemagne et supérieur à 15kWhu/m2Shab/an dans les pays plus froids.
Si on décide de respecter le critère du besoin maximum, soit 15kWhu/m2SHab/an, le projet devra être optimisé à ce niveau. Si les calculs montrent un besoin supérieur, les caractéristiques du bâtiment devront être améliorées pour atteindre cet objectif. Si les calculs montrent un besoin inférieur, ses caractéristiques devront être optimisées pour limiter le prix de construction. Plus la durée de chauffage sera faible et plus la puissance pourra être élevée pour rester le plus proche possible du besoin maximum. Dans ce cas, la puissance pourra dépasser 10Wu/m2Shab et le chauffage par l’air ne sera plus possible.
Choisir de respecter le critère de puissance permet de chauffer par l’air et nécessite d’opter pour une VMC adaptée alors que choisir de respecter le besoin maximal peut nécessiter de choisir un système de chauffage plus classique quand il conduit à une puissance maximale supérieure à 10Wu/m2Shab.
Le choix économique du critère de chauffage à respecter
doit être uniquement basé sur le prix des solutions techniques qui en découle.
La compacité du projet
De nombreux articles ont été écrits sur ce site dont le premier porte le titre « Compacité des bâtiments et conséquences ». Tous les articles sont liés entre eux. C’est le seul facteur qui permette d’économiser simultanément sur le prix de la structure et sur le prix des prestations thermiques. Les défauts de ce point de vue augmentent les prix suivant une courbe en forme d’exponentielle. Autant dire que toute erreur de ce point de vue peut être fatale pour le prix du projet.
Les seules constructions passives constructibles à un prix acceptable
sont nécessairement compactes.
Les protections solaires
Les études manquent sur les maisons passives en France parce qu’il n’y en a que très peu, surtout dans le sud. Il en existe toutefois sur les constructions basse consommation. Le résultat est sans appel. Ces constructions surchauffent en été. Il n’y a pas d’autre choix que de prévoir des pare-soleil. Dans le sud, ces équipements permettent de vivre volets ouverts en été alors que traditionnellement ils sont fermés pour éviter les surchauffes.
Les pare-soleil peuvent être considérés comme un surcoût en construction classique parce que leur intérêt essentiel est limité à l’amélioration de leur qualité architecturale. Alors qu’en construction passive, leur prix est le même, ils sont indispensables parce qu’ils ont aussi une fonction de confort absolument indispensable en été tel que détaillé dans l’article « Compacité des bâtiments et architecture ».
Les pare-soleil sont indispensables en construction passive,
les supprimer ne peut pas être une option destinée à limiter les coûts des projets.
Les matériaux de structure et d’isolation
Bois, briques, blocs de béton creux, béton, béton cellulaire, métal,… constituent une grande majorité des matériaux de structure à notre disposition pour la réalisation de nos constructions passives ou non. Leurs variantes et les méthodes de mise en œuvre de chacun sont nombreuses. Les systèmes d’isolation et les matériaux utilisables avec chacun sont multiples. Les matériaux et techniques de finition également.
Le nombre de combinaisons des choix possibles n’est pas illimité, mais il est considérable et augmente tous les jours avec de nouveaux matériaux ou de simples évolutions de ceux qui existent déjà. Suivre l’évolution des plus courants est déjà difficile, connaître tous les nouveaux produits est totalement impossible. Chacun a pourtant une incidence sur le prix de construction et les différences sont très importantes puisque les coûts unitaires peuvent varier du simple à plus du double. Le choix des matériaux peut faire varier le prix des constructions de plusieurs dizaines de milliers d’euros. L’impact est capital et se cumule avec ceux des autres variables.
Les matériaux de structure, d’isolation et de finition
peuvent faire varier les prix des parois verticales et horizontales du simple à plus du double.
Les performances des matériaux et des matériels
D’un point de vue économique, une maison passive n’est pas une compilation des meilleures solutions thermiques connues à n’importe quel prix, mais la combinaison thermiquement optimisée des solutions les moins chères. Il faut donc choisir les meilleures solutions technico-économiques, les matériaux et les matériels qui présentent le meilleur rapport qualité/prix en fonction de la région de construction puis les optimiser, individuellement et globalement, afin de concevoir le projet passif le moins cher possible. Autrement dit, afin de minimiser le prix des constructions passives, un matériau ou un matériel doit d’abord être choisi pour son rapport qualité/prix avant de l’optimiser sur le plan thermique. La faisabilité des projets et le développement du concept sont à ce prix. La connaissance et l’expérience des produits et des prix est un atout capital.
Afin de baisser les prix de construction,
les matériaux et les matériels doivent être retenus, avant toute recherche d’optimisation thermique,
pour atteindre le meilleur rapport qualité/prix en fonction du climat
Les choix techniques de conception
L’orientation de la construction, la répartition et la taille des menuiseries ainsi que leur position dans les parois des façades, la présence de murs de refend, les hauteurs sous plafond, la présence d’un sas, le choix du modèle de VMC et son positionnement dans la construction, le respect des normes PMR (Personnes à Mobilité Réduite)… sont des choix de conception qui ont un impact sur le prix des projets. Au-delà de leur impact individuel, c’est leur combinaison qui doit faire l’objet de toute l’attention du concepteur.
Tous les éléments qui améliorent le bilan énergétique d’une construction
baissent sa consommation, mais augmentent son prix global
L’obligation de compensation entre prestations thermiques
Une modification des performances d’une prestation implique une variation de la puissance nécessaire et du besoin annuel. Comme les critères doivent être optimisés une baisse de prestations sur un composant du projet implique une augmentation de performance par ailleurs pour compenser l’augmentation de la puissance et des besoins. L’inverse est également vrai.
Les performances vont généralement de pair avec le prix. Passer de doubles vitrages à des triples vitrages permet, par exemple, de baisser l’épaisseur des isolants des façades. Cette action conduit à augmenter le prix des menuiseries, mais à baisser, en parallèle, les prix des parois. Dans ce cas quelle est la solution la plus économique : double vitrage avec isolation des façades plus performante ou triple visage avec isolation des façades moins efficace ? Quel serait l’impact si la baisse de prestation avait lieu sur l’isolation du sol, du toit ou sur le type de VMC.
Le choix des matériaux et matériels ne peut pas se faire seul, indépendamment des autres, en dehors du contexte dans lequel il va être mis en œuvre parce qu’il va avoir un impact positif ou négatif sur ce contexte sans pour autant que le bilan ne change : dans tous les cas le projet devra être passif et donc respecter tous les critères du concept.
Les calculs d’optimisation économiques ne pourront pas être réalisés prestation par prestation parce que leur combinaison serait bien celle présentant le prix global de construction le plus faible avec le risque que le résultat ne soit plus une solution passive.
L’optimisation économique des matériaux et matériels d’un projet doit être globale
et pas uniquement axée sur une partie de ses composants afin de respecter les critères du concept passif.
La complexité dans la simplicité
Les ingrédients du coût sont définis ci-dessus, au moins en partie. On pourrait penser qu’il ne reste qu’à en faire une recette à recopier à qui mieux. Ce n’est malheureusement pas possible parce que chaque ingrédient possède fréquemment plusieurs recettes à lui seul. La recette globale doit être une compilation spécifique et optimisée de celles qui sont retenues.
La recette idéale n’existe pas, elle devra être adaptée à chaque projet et à chaque terrain, mais les bases qui dépendent de chaque climat pourront toutefois être proches. Hormis les adaptations spécifiques, l’expérience acquise pour une pourra être en partie reproduite pour d’autres. Dans tous les cas, il faudra…
Faire simple pour être efficace à coup sûr
pour s’assurer que le résultat sera atteint le plus facilement possible au moindre coût
pour que les entreprises puissent réaliser les travaux sans de trop grandes difficultés
En conclusion,
Construire passif à un prix acceptable ne s’improvise pas
En résumé :
- Les constructions passives sont moins chères dans les climats les moins froids en hiver
- Afin de baisser les prix de construction, les matériaux et les matériels doivent être retenus, avant toute recherche d’optimisation thermique, pour leur meilleur rapport qualité/prix en fonction du climat
- Tous les éléments qui améliorent le bilan énergétique d’une construction baissent sa consommation, mais augmentent son prix global
- L’optimisation économique des matériaux et matériels d’un projet doit être globale
Thème 4 - Les maisons passives