13-2 - Conception traditionnelle des puits climatiques
11/10/2016 -
La nécessité de ventiler et d'améliorer le confort
La réglementation l'impose. Notre santé en dépend. Tous nos lieux de vie, habitation, bureaux, espaces publics… doivent être ventilés en continu. Comme indiqué dans l'article "Puits climatique, canadien ou provençal : les principes", la nécessité de réduire la consommation d'énergie de tous les bâtiments, notamment pour le chauffage, a imposé de réduire celle qui résulte de leur ventilation toute en conservant en permanence un air intérieur de bonne qualité. Cette obligation, qui implique de fait une ventilation stable et sans interruption, a pratiquement imposé l'usage de systèmes de Ventilation Mécanique Contrôlée. L'obligation de mettre en œuvre une VMC et le constat de l’augmentation de la fréquence des périodes de canicule ont fait resurgir une méthode ancestrale pour tenter de réduire les impacts des variations des températures extérieures sur nos habitations, leur confort et leur consommation d'énergie. Il s'agit du puits climatique, plus communément appelé puits provençal s'il doit assurer le confort en été et puits canadien s'il a le même rôle en hiver.
Le principe du puits climatique aéraulique
Pour rappel, tel que précisé dans l'article précédent, le principe du puits climatique consiste à faire transiter de l'air neuf dans des canalisations enterrées entre 1,5 et 2m de profondeur avant qu'il n'arrive dans les locaux. En circulant, l'air échange sa chaleur avec son environnement, la terre, dont il n'est séparé que par les parois des conduits. Au fil de son déplacement, il finit par se rapprocher de la température du sol. Un puits climatique aéraulique est donc un échangeur géothermique superficiel de chaleur entre un fluide caloporteur, c'est-à-dire l’air qui circule dans ses canalisations, et le sous-sol.
Les espoirs d'amélioration du confort grâce aux puits climatiques
En hiver le sous-sol est fréquemment plus chaud que l'air extérieur, notamment la nuit. L'air peut donc se réchauffer en circulant dans un puits canadien avant de pénétrer dans les locaux. En été, c'est généralement l'inverse. L'air peut se rafraîchir en traversant un puits provençal notamment dans la journée. En dehors de ces périodes, un puits climatique peut être efficace ou totalement contre-productif. Avec les modifications climatiques que nous connaissons et les records de chaleur qui sont battus de mois en mois et d'années en années, il peut arriver, dans pratiquement tous les climats français, que l'air extérieur soit plus chaud que le sous-sol en hiver, notamment en milieu de journée quand le soleil chauffe, et qu'il soit plus frais que le sol en été, notamment la nuit quand le puits canadien a été chauffé toute la journée par l'air qui le traverse. En mi-saison, il peut arriver qu'il soit nécessaire de rafraîchir une construction du fait, par exemple, d'apports solaires devenus trop importants, ou, au contraire, de la chauffer du fait d'une baisse de température nocturne. Ces remarques impliquent que, pour améliorer le confort et baisser le besoin énergétique, l'air doit pouvoir être pris soit à l'extérieur, soit dans le puits climatique, mais toujours de la manière la plus efficace possible. Un by-pass, qui peut obstruer sur commande la voie la moins efficace, contrôlé par des capteurs de température, doit permettre de choisir automatiquement l'air dont la température est la plus proche de la consigne définie dans les locaux.
Des précautions doivent être prises en été. L'air qui rentre dans les canalisations se rafraîchit et la vapeur qu'il contient peut se condenser. Il est donc nécessaire de prévoir l'évacuation de ces condensats pour éviter les risques de développement de bactéries, de moisissures et d'odeurs désagréables que leur stagnation ne manquerait pas de provoquer.
Les composants d'un puits climatique aéraulique
Un puits climatique aéraulique se compose :
- d'une borne d'entrée d'air extérieur,
- de canalisations enterrées,
- d'un regard de récupération des condensats et
- d'un ventilateur et d'une grille de ventilation dans le cas d'une VMC simple flux
- d'un raccordement au système de ventilation dans le cas d'une VMC double flux
- une entrée d'air directe
- un by-pass automatique étanche pour sélectionner l'air dont la température est la plus efficace et
- un système de régulation pour notamment commander son by-pass
- d'eau de pluie, de ruissellement ou de débordement ainsi que de celle résultant d'éclaboussures
- de feuilles et branchages
- de petits animaux rongeurs ou oiseaux
- d'insectes
- de poussières
- de pollens
- de la pollution découlant notamment de la circulation trop proche de véhicules ou encore de la présence de poubelles
Quel que soit le type de bâtiment, les canalisations, posées en boucle, en méandre ou en bouche de Tichelmann, dont le dessin est similaire à celui d'un radiateur hydraulique, doivent être :
- résistante la pression de 1,50 à 2m de terre
- étanche afin d'évier la pénétration d'eau en provenance d'une nappe phréatique, d'une source ou d'une poche d'eau aléatoire et évolutive surtout en terrain argileux
- étanche à l'air pour éviter notamment le passage de radon, un gaz ionisant naturel et donc nocif qui se trouve fréquemment dans le sous-sol.
- non poreuses pour les mêmes raisons
- en matériaux non soumis à des risques de corrosion
- rigides pour éviter les dépressions et la création des poches d'eau intérieures
- dotées de joints étanches à l'air et durables à très long terme
- posées en pente d'au moins 2% dans le sens du passage de l'air pour éviter tout risque de stagnation des condensats
- posées sur un fond de tranchée suffisamment rectiligne et résistant pour éviter tout tassement local pouvant provoquer la création de poches intérieures de condensation
- en matériaux conducteurs pour améliorer le transfert de chaleur de l'air vers la terre qui les entoure
- accessibles pour permettre leur entretien
- circulaires pour faciliter leur nettoyage
- traitées antistatique pour éviter un encrassement rapide
- lisses à l'intérieur pour éviter les pertes de charge inutiles et donc l'augmentation de l'énergie nécessaire à la VMC ou au ventilateur qui assure la circulation de l'air
- optimisées pour les échanges de chaleur avec un diamètre d'environ 20cm
- espacées d'au moins 60cm si elles constituent un réseau
Un puits climatique est en grande partie enfoui dans le sol. Il y est pour longtemps, très longtemps. Les matériaux utilisés pour les canalisations doivent avoir une durée de vie de plusieurs dizaines d'années sans perte de leurs caractéristiques. Leur mise en œuvre doit également limiter les risques en étant :
- éloignées de racines pouvant les déplacer ou même les détruire
- protégées par une membrane résiliente, lors de la traversée de parois maçonnées pour éviter qu'elles ne cassent en cas de mouvement de sol
- protégées par un grillage avertisseur pour les repérer et éviter les dégâts en cas de travaux ultérieurs
Le regard de récupération des condensats doit être situé au point le plus bas du puits climatique. Les condensats doivent pouvoir s'évacuer dans un puisard s'il n'y a jamais de risque d'infiltration d'eau, ce qui est plutôt rare, ou grâce à une pompe de relevage. Il doit être facilement accessible et parfaitement nettoyable.
Toutes les solutions permettant d'améliorer les performances globales des puits climatiques doivent également être mises en œuvre et notamment :
- la pose dans un sol de préférence humide pour augmenter sa conductivité et son inertie, donc en terre plutôt qu'en sable
- une mise en œuvre au sud de la construction en cas d'utilisation principale en hiver ou au nord en cas d'utilisation principale en été du fait d'un écart de température du sous-sol qui peut dépasser 4°C suivant l'orientation. Le sol au nord étant par ailleurs plus frais et donc plus humide.
- l'étanchéité parfaite du by-pass pour que l'air soit totalement géré par le puits climatique sans mélange inapproprié avec de l'air extérieur dont la température et le débit ne sont pas maîtrisables
- l'isolation des canalisations à la sortie du puits climatique, si elles sont de nouveau soumises au climat extérieur notamment en traversant un sous-sol
Le dimensionnement d'un puits climatique aéraulique
Le dimensionnement d'un puits climatique nécessite de prendre en compte de nombreux paramètres spécifiques :
- la place disponible pour l'enfouissement des canalisations
- la nature du sol
- l'humidité du sol
- le climat local
- le débit de ventilation nécessaire au bâtiment en hiver et en été
- les pertes de charge dans le réseau et la consommation des ventilateurs
- la conductivité des canalisations…
Quelques paramètres ont des valeurs dont la plage de variation prédéfinie doit être respectée :
- la profondeur du puits climatique doit être de 1,5 à 2m pour un fonctionnement saisonnier plus stable, bien moins pour un fonctionnement seulement orienté vers le confort au quotidien
- la vitesse de l'air qui doit être comprise entre 1,5 et 4m/s
- le diamètre des canalisations doit rester proche de 20cm
- une distance d'au moins 60cm doit séparer les tubes ou méandres
Les performances généralement atteintes
Les puits canadiens sont généralement dimensionnés en fonction des caractéristiques ci-avant de manière à ce que la température de sortie du puits soit la plus proche possible de celle du sol. En période hivernale, ils peuvent être dimensionnés pour que la température en sortie du puits soit d'environ 2°C lorsque la température extérieure est d'environ -10°C. Le gain de température atteint alors 12°C. Un puits provençal de ce type peut baisser la température estivale en sortie du puits à 20°C pour une température extérieure de 32°C lorsque le débit de ventilation est identique à celui de l'hiver.
Prédimensionnement pour une maison d'habitation
Il existe un nombre très restreint de logiciels capables de dimensionner les puits climatiques en fonction des bâtiments qu'ils desservent. Pour une maison individuelle de 80 à 200m2 avec un renouvellement d'air de 0,5V/h en hiver, une longueur d'environ 50m permettra d'atteindre les objectifs sans y avoir recours lorsque les paramètres prédéfinis sont respectés.
Les risques liés aux puits climatiques aérauliques
Les concepts de base des puits climatiques aérauliques sont simples. Les contraintes et les caractéristiques qui ont une incidence sur leur potentiel et sur les risques de défauts de réalisation, de fonctionnement automatique ou d'usage sont, par contre, très nombreuses tel qu'indiqué ci-avant. La qualité de leur mise en œuvre ne peut pas toujours être garantie par des entreprises qui n'ont que très rarement les compétences requises. D'autre part, qui peut garantir leur fonctionnement correct sur plusieurs dizaines d'années sans risque de détérioration du fait de la végétation ou de mouvement du sol par exemple? Toutes choses qui ne sont pas vraiment contrôlables, c'est le moins qu'on puisse dire. Deux autres facteurs ont une grande importance. La place nécessaire à leur réalisation, qui est parfois insuffisante, et leur prix qui reste très élevé au regard des avantages qu'ils peuvent fournir. Fort de toutes ces remarques une nouvelle solution a été développée. Elle résout une grande partie des problèmes : il s'agit du puits climatique hydraulique.
Les puits climatiques hydrauliques
Le principe est proche de celui des puits aérauliques, mais le fluide caloporteur est l'eau qui peut, à conditions identiques de débit et de variation de température, transporter 3500 fois plus d'énergie que l'air. Les sections de tubes peuvent être bien plus faibles et les débits également. Contrairement aux puits aérauliques, dans lesquels le fluide caloporteur circule en permanence en circuit ouvert, de l'extérieur vers l'intérieur, dans les puits hydrauliques, il circule en circuit fermé sans aucun entretien. La chaleur est transmise à l'air par une batterie hydraulique. Pour éviter le risque de gel de l'eau en hiver, lorsque de l'air très froid passe sur cette dernière, il suffit d'ajouter du glycol.
Les canalisations utilisées sont systématiquement des tubes en polyéthylène haute densité, d'un diamètre intérieur de 25mm et d'un diamètre extérieur de 32mm, dont la durée de vie est de plusieurs dizaines d'années. Ce sont les mêmes que celles qui sont utilisées pour les adductions d'eau potable de toutes nos constructions. Ces tubes peuvent supporter des températures de -50 à +100°C, soit bien plus que les conditions qui règnent dans les puits climatiques. Leur conductivité, de l'ordre de 0,5W/m.K, est meilleure que la plupart de celle des tubes utilisés pour les puits aérauliques. Ils ne présentent aucun problème de résistance à la compression. Posés sans raccord, ils sont parfaitement étanches à l'eau et donc sans risque de fuite inaccessible. Ils sont lisses dedans et dehors, non poreux, sans risque d'oxydation. Ils peuvent être posés avec ou sans pente. Avec ce type de puits canadien, tous les risques liés à un circuit ouvert à air disparaissent et donc, entre autres, les risques bactériologiques, de développement de moisissures ou de transmission d'odeurs.
Tous les risques ne sont pas supprimés pour autant. Ceux liés à la mise en œuvre des puits à air persistent bien sûr. Les racines comme la traversée des parois peuvent toujours être un problème même s'il est fortement réduit. La présence d'un grillage avertisseur est tout autant nécessaire. Les puits hydrauliques présentent de plus deux autres inconvénients. Ils nécessitent une pompe pour faire circuler l'eau dans les canalisations et cette dernière consomme forcément de l'énergie. La batterie hydraulique, quant à elle, réduit légèrement l'efficacité thermique de l'ensemble.
Globalement toutefois, les inconvénients liés aux puits hydrauliques sont largement inférieurs à ceux résultant de la mise en œuvre des puits aérauliques. Ceci est d'autant plus vrai que la mise en œuvre de ces puits, par une entreprise non qualifiée, comme c'est très souvent le cas, est largement plus facile que la réalisation d'un puits aéraulique et que, de plus, leur coût de réalisation est moins élevé. Leur fonctionnement est également plus simple. Les retours d'expérience montrent, de plus, que les puits climatiques les plus simples sont ceux qui présentent le moins de défauts de fonctionnement

En conclusion
Les puits climatiques les plus simples sont ceux qui présentent le moins de défauts de fonctionnement
Les puits climatiques hydrauliques sont préférables aux puits climatiques aérauliques
En résumé :
- Les puits climatiques aérauliques sont complexes à réaliser et peuvent présenter des risques à l'usage
- Les puits climatiques hydrauliques sont faciles à réaliser, sans entretien et sans risque à l'usage
- Les puits climatiques hydrauliques nécessitent le fonctionnement d'une pompe de circulation du fluide caloporteur et donc la consommation de l'énergie qui en découle
- Les puits climatiques les plus simples sont ceux qui présentent le moins de risques
- Les puits climatique hydrauliques sont préférables aux puits climatiques aérauliques
Thème 13 - Les puits climatiques
- 13-1 - Puits climatique, canadien ou provençal : les principes
- 13-2 - Conception traditionnelle des puits climatiques
- 13-3 - Interactions entre puits climatiques et VMC
- 13-4 - Efficacité du couplage entre puits canadien classique et VMC Double Flux
- 13-5 - Un puits canadien classique n'est efficace qu'en maison passive
- 13-6 - Efficacité du couplage entre puits provençal classique et VMC Double Flux
- 13-7 - Un puits provençal classique n'est efficace qu'en maison passive
- 13-8 - Comment optimiser un puits provençal et baisser son prix dans une maison passive?
- 13-9 - Recette pour concevoir un puits climatique, canadien ou provençal dans une maison passive
- 13-10 - En période de canicule, un puits provençal ne doit pas être arrêté la nuit
- 13-11 - Une bibliographie gratuite sur les concepts de puits climatique, canadien ou provençal